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quarta-feira, 16 de abril de 2025
ORTEGA Y GASSET BBB sobre
https://www.persee.fr/doc/phlou_0035-3841_1980_num_78_37_6325 e/ou
https://docs.google.com/document/d/1YEwVpLwrr5hoMx14RcV3B_CHJTceRCeK/edit
pas, bien sûr, épuiser le contenu très dense de ces pages; au lieu de cela,
nous avons choisi quelques métaphores, car Ortega a été un homme de
métaphores, et à partir de celles-ci nous avons interprété le texte. Voici
ces quelques métaphores : «la forêt véritable se compose d'arbres que je
ne vois pas». «La forêt fuit devant les yeux». «Comme disait le paysan
de Poitiers, la hauteur des maisons empêche de voir la ville». «La forêt
est une nature invisible»8.
Voici maintenant notre interprétation. Le monde est ce qui est
invisible, ce que nous ne pouvons pas saisir d'un seul coup : un ensemble
de perspectives, d'horizons. Il est la circonstance dernière qui englobe
toutes les circonstances. Il est le fait de vivre au milieu d'une situation qui
renvoie indéfiniment aux autres situations; ou bien l'ensemble de
circonstances qui se renvoient indéfiniment les unes aux autres, la
circonstance dernière étant ce que nous ne pouvons saisir parce que nous
ne possédons toujours qu'une circonstance. La circonstance dernière
(c'est la forêt !) se manifeste à nous précisément comme le renvoi d'une
situation vers une autre. Elle est la profondeur qui, comme disait Ortega,
ne peut se manifester que comme superficie9, comme dimension limitée,
finie. Il n'y a pas une essence du monde qui s'offre à nous; ce que nous
possédons, ce sont des profils visibles qui renvoient à ce qui demeure
invisible. Rappelons-nous : la forêt est une nature invisible. Et ce
mouvement d'une circonstance à l'autre, d'une clairière de la forêt à
l'autre en cherchant ce qui fait telle la forêt, est l'histoire humaine. C'est
pour cela que nous ne pouvons plus penser dorénavant, si ce n'est d'une
façon finie et limitée, car nous ne trouvons jamais la forêt. Bien entendu,
si nous ne sommes jamais sans le monde, sans la forêt, celle-ci n'est
jamais sans nous. Il y a ici comme une tentative de dépassement de la
relation sujet-objet, que notre penseur enfermera dans une phrase trois
fois célèbre : « Yo, soy yo y mis circunstancias» (moi, je suis moi et mes
circonstances)10. Nous pensons que dans cette phrase apparemment
banale se synthétise toute la pensée du grand philosophe espagnol. Avec
elle Ortega coupe avec l'idéalisme et sort vers le monde. Le moi
souverain, rationaliste, est destitué parce qu'il ne peut pas subsister
séparé du monde, dans la tour d'ivoire de la raison pure. Le moi se trouve
maintenant profondément constitué par le monde, plongé dans la
circonstance. Cependant la circonstance reçoit une réponse du moi. Elle
est interprétée par le langage de l'homme : comme dirait Ortega,
l'interprétation est une traduction du langage muet de l'être en langage
de l'homme11. Sans aucun doute, le cœur même de l'interprétation
ortéguienne de la relation ontologique entre l'homme et l'être se trouve
ici. Notre penseur abandonne d'un seul coup le grand idéalisme, et non
seulement celui-ci, mais aussi toute métaphysique qui voudrait
surplomber l'histoire. Peut-être commence-t-il à abandonner à ce moment-là la
philosophie même et met-il le cap sur un nouveau continent. En effet ce
qui s'institue ici est un dialogue profond entre l'homme et le monde, ou
comme Ortega aimait le dire, entre l'homme et les choses; mais un
dialogue qui est traversé de part en part par une finitude profonde : d'un
côté les choses dans leur silence éternel et de l'autre l'homme perdu au
milieu de celles-ci, naufragé12; car pour le penseur cette relation se
confond avec un naufrage onto-mythique dans lequel l'homme a échappé
à la nature; «l'homme est condamné à s'éloigner de plus en plus de la
Nature, à construire dans son trou une sur-nature»13. Peut-être, en un
langage que le philosophe n'emploie pas, nous pourrions imaginer une
scission au sein de l'être un et originaire d'où l'homme a surgi.
Ortega perçoit dans cette union entre l'être et l'homme le mystère
même de la liberté humaine au sein du monde; car la liberté est
précisément ceci chez lui : se savoir égaré dans le monde avec le devoir de
s'inventer sa vie. Nous sommes des naufragés et la liberté est une
tentative pour ne pas nous noyer : l'effort désespéré de tout notre être
pour ne pas céder au désespoir. Et ne pas céder au désespoir signifie chez
notre philosophe s'inventer la vie, toujours sa propre vie : ainsi l'histoire
est à la fois naufrage et invention de soi-même.
Mais alors, pourrions-nous nous demander, l'histoire comme
liberté, vient-elle de Dieu ou est-elle plutôt un fait premier sans aucun
fondement, indécidable?
Que nous sachions, Ortega n'a jamais dit, au moins dans ses écrits,
que la liberté ait son origine en Dieu. Et nous pensons qu'il ne pouvait
pas dire cela, parce que ses rares allusions au problème de Dieu sont très
ambiguës. On a l'impression qu'Ortega n'a jamais vu très clairement
cette dernière question14; ou bien aussi le contexte catholiq
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